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Tour d’horizon des chantiers en cours et à venir en matière sociale

Social - IRP et relations collectives, Protection sociale, Paye et épargne salariale, Formation, emploi et restructurations, Santé, sécurité et temps de travail
04/09/2018
Formation professionnelle, apprentissage, assurance chômage, santé au travail, retraites, budget 2019, la rentrée sociale de septembre 2018 s’annonce chargée pour le gouvernement et les partenaires sociaux. Le point sur les réformes attendues.
Depuis le 29 août, le Premier ministre Édouard Philippe, la ministre du Travail Muriel Pénicaud et celle des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn effectuent des bilatérales avec les partenaires sociaux. Au programme de ces réunions qui se terminent le 4 septembre : aborder les dossiers chauds de la rentrée, à savoir l’assurance chômage, la santé au travail et l’indemnisation des arrêts de travail pour maladie d’origine non professionnelle. Autres sujets phares de la rentrée : le budget 2019, ou encore l’explosive réforme des retraites. Le calendrier de toutes ces réformes reste flou, mais il pourrait s’éclaircir lors du prochain séminaire gouvernemental qui se tiendra après le conseil des ministres, le 5 septembre. Ces séminaires rythment la vie du gouvernement, « en faisant partager à tous les ministres la feuille de route gouvernementale et en scandant le travail des trois prochains mois », avait expliqué Édouard Philippe à l’issue du dernier d’entre eux, le 30 mai. Le Premier ministre pourrait ainsi confirmer la présentation mi septembre du plan « pauvreté ».
 
Mise en œuvre de la loi Avenir professionnel
 
La loi Avenir professionnel, définitivement adoptée le 1er août dernier, devrait très prochainement être publiée au Journal officiel, une fois que le Conseil constitutionnel aura rendu sa décision. Il devait statuer le 4 septembre. Pour mettre en application les mesures de cette loi, une centaine de décrets sont attendus dont environ 70 en matière de formation professionnelle et d’apprentissage. Autre sujet qui fera l’objet d’un décret, l’égalité femmes/hommes. En effet, les entreprises d’au moins 50 salariés devront publier chaque année des indicateurs relatifs à la fois aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes et aux actions mises en œuvre pour les supprimer. Cette obligation sera mise en œuvre selon des modalités et une méthodologie définies par décret et qui devraient être inspirées des conclusions attendues de la mission confiée à Sylvie Leyre, DRH France de Schneider Electric.
 
Vers une nouvelle négociation sur l’assurance chômage à l’automne
 
En matière d’assurance chômage, les bilatérales précitées devraient être suivies d’une « phase de diagnostic partagé » avec « quatre séances », a détaillé le 2 septembre la ministre du Travail lors de l’émission le grand Jury RTL/Le Figaro/LCI. Muriel Penicaud enverra fin septembre aux partenaires sociaux une lettre de cadrage. Outre le respect de la trajectoire financière, le document de cadrage comprendra des objectifs d’évolution des règles de l’assurance chômage permettant de lutter contre la précarité et d’inciter les demandeurs d’emploi au retour à l’emploi. Il proposera de revoir l’articulation entre assurance et solidarité, le cas échéant par la création d’une allocation chômage de longue durée attribuée sous condition de ressources. D’autres sujets sont également sur la table, comme celui de la dégressivité des allocations chômage des cadres. Sur le dossier des intermittents du spectacle, et le fait de savoir s’il serait rouvert, la ministre a indiqué que « pour l’instant, c’est un sujet qui n’a été soulevé ni par le patronat, ni par les syndicats, ni par le gouvernement ».
 
Une négociation sur la santé au travail ?
 
S’agissant de la santé au travail, les récentes bilatérales doivent permettre « l’élaboration d’un programme de travail en matière sociale ». Une négociation interprofessionnelle pourrait se tenir sur la base de ces orientations, si les partenaires sociaux le souhaitent. Celle-ci pourrait s’alimenter des deux rapports rendus récemment au gouvernement : celui de Charlotte Lecocq, Bruno Dupuis et Henri Forest sur le système de santé au travail et celui de Paul Frimat sur l’exposition aux agents chimiques dangereux.
 
Le projet de loi Pacte au menu de la session extraordinaire
 
Adopté en Conseil des ministres le 18 juin dernier, le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises figure à l’ordre du jour de la session parlementaire extraordinaire qui débutera le 12 septembre. Avant son passage en première lecture à l’Assemblée nationale, le texte sera examiné à partir du 5 septembre en commission spéciale. Ce projet de loi prévoit notamment :
 
– de privilégier les seuils d’effectif de 11, 50 et 250 salariés, d’harmoniser le mode de calcul des effectifs, ainsi que d’accorder un délai de cinq ans aux employeurs pour se conformer à leurs obligations découlant du franchissement d’un seuil d’effectif ;
 
– de supprimer le forfait social sur l’épargne salariale dans les entreprises de moins de 50 salariés et sur l’intéressement dans les entreprises de moins de 250 salariés ;
 
– de réformer les dispositifs d’épargne retraite ;
 
– d’ouvrir la possibilité d’inscrire dans le statut des entreprises la raison d’être de leur activité au regard des enjeux sociaux et environnementaux ainsi que de renforcer le nombre d’administrateurs salariés dans les conseils d’administration.
 
Projet de loi Fraude
 
Figure également au menu de la session parlementaire : le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude qui a pour objectif de renforcer les moyens de détection, d’appréhension et de sanction de la fraude fiscale et sociale. Les députés l’examineront à compter du 17 septembre. Les sénateurs l’ont déjà adopté en première lecture le 4 juillet.
 
Examen du projet de loi Elan et de la révision constitutionnelle
 
Le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Elan), adopté en première lecture par les deux chambres parlementaires, sera prochainement examiné par la commission mixte paritaire (CMP) en vue de l’élaboration d’un texte de compromis entre députés et sénateurs. Ce texte prévoit notamment de créer un « bail mobilité » d’un à dix mois, destiné aux personnes en formation, études supérieures, stage, apprentissage ou mission temporaire professionnelle. Quant à l’examen des trois projets de loi (constitutionnel, organique et ordinaire) pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace, il est actuellement suspendu.
 
Réforme du système de retraite
 
Chantier majeur du quinquennat, la réforme du système de retraite ambitionne d’établir un régime universel dans lequel « un euro cotisé apporterait à tous les mêmes droits ». Ce régime pourrait fonctionner selon un système par points et le principe de la répartition serait conservé. Depuis mai 2018, le Haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, rencontre de manière régulière les partenaires sociaux, tandis qu’une consultation citoyenne a été lancée en parallèle. Les échanges avec le patronat et les syndicats vont se poursuivre jusqu’à la fin de l’année. Puis, début 2019, le gouvernement devrait présenter les orientations de la réforme, qui donnera le coup d’envoi d’une seconde phase de discussions avec les partenaires sociaux. Un projet de loi qui devrait être présenté à l’été 2019. La réforme n’entrera pleinement en vigueur qu’en 2025, de manière à permettre à toutes les caisses de retraite de faire la transition.
 
Un budget 2019 sous tensions
 
Les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2019 devront être respectivement déposés à l’Assemblée nationale au plus tard les 2 et 15 octobre. Leur contenu sera impacté par la révision à la baisse de la prévision de croissance pour l’année prochaine, diminuée à 1,7 %. En conséquence, plusieurs mesures d’économie ont été annoncées par le gouvernement : la désindexation de certaines prestations sur l’inflation. Ainsi, les allocations familiales, les pensions de retraite et l’APL progresseront de façon plus modérée, de 0,3 % par an en 2019 et en 2020 (pour une inflation de 1,7 % en 2019) ; le report d’une réduction de cotisations sociales patronales de quatre points du 1er janvier 2019 au 1er octobre 2019.
 
Autre annonce : la désocialisation des heures supplémentaires serait avancée d’une année par rapport au calendrier prévu initialement. Ainsi, « dès le 1er septembre 2019, les cotisations salariales sur les heures supplémentaires seront supprimées pour tous les salariés, dans le privé comme dans le public ».
 
Vers une refonte de la prise en charge des arrêts maladie ?
 
Si le premier ministre a bien écarté un « transfert brutal » de la prise en charge des arrêts maladie de moins de huit jours de la sécurité sociale vers les entreprises, le sujet reste néanmoins à l’ordre du jour du gouvernement qui souhaite contenir une augmentation de près de 4 % par an. Du côté du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux a ce sur point rappelé « très fortement au Premier ministre » l’opposition du Medef « au déremboursement éventuel des indemnités journalières ».
 
La reprise des négociations sur l’encadrement est annulée « sine die »
 
Alors que les partenaires sociaux n’ont plus que jusqu’au 31 décembre 2018 pour parvenir à un accord sur le statut de l’encadrement, selon la CGT la reprise des négociations est annulée « sine die » par le Medef. En cause, le négociateur en charge du dossier a rendu son tablier d’après la centrale. Seulement deux séances se sont tenues et la dernière remonte au 13 mars 2018.
 
Publication des rapports sur les congés maternité et paternité
 
Deux rapports sont toujours en attente de publication : le rapport de la députée LREM Marie-Pierre Rixain sur le congé maternité, remis le 17 juillet à Agnès Buzyn, et le rapport de l’Igas sur le congé paternité.

Par Joris Monier et Romain Boutin
Source : Actualités du droit