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Cour de cassation : quels inédits retenir cette semaine ?

Social - Contrat de travail et relations individuelles, Formation, emploi et restructurations, Paye et épargne salariale, IRP et relations collectives
07/02/2020
Les arrêts de la Chambre sociale de la Cour de cassation à retenir parmi les non publiés du fonds de concours de la semaine du 3 février 2020.
La rupture du contrat de travail ne peut résulter du seul fait que le salarié ne soit pas passé au service du repreneur
 
Pour fixer la date d’effet de la résiliation judiciaire du contrat de travail au jour de la liquidation judiciaire et décider que l’AGS est tenue de garantir les indemnités de préavis, de congés payés, de licenciement et les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’arrêt d’appel retient que le contrat de travail était toujours suspendu, que le grief fait au salarié d'avoir sollicité la demande de résiliation judiciaire après le prononcé de la liquidation et alors qu'il n'a jamais été licencié est inopérant, que le salarié ne prétend pas être passé au service du repreneur de la société puisqu'il demande lui-même la fixation de la date de la résiliation judiciaire à la date de la liquidation de la société, que l'article 4 du Code de procédure civile s'oppose à ce que la cour fixe la résiliation judiciaire à la date de son arrêt, que la cour en conclut qu'à tout le moins à cette date, M. G. a estimé ne plus être à la disposition de la société de sorte que la résiliation judiciaire est fixée au jour de la liquidation judiciaire de la société.
En statuant ainsi alors que la rupture du contrat de travail ne pouvait résulter du seul fait que le salarié ne soit pas passé au service du repreneur, et qu'il résultait de ses constatations qu'aucun licenciement n'avait été prononcé dans les 15 jours suivant le jugement de liquidation judiciaire par le mandataire liquidateur, la cour d'appel a violé les articles 1184 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et L. 3253-8 du Code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016. Cass. soc., 29 janv. 2019, n° 18-24.607 F-D
 
Retard dans le paiement des salaires : trois mois de retard ne justifie pas la prise d’acte
 
Le retard dans le paiement des salaires des mois de mars et avril 2012 n'empêche pas la poursuite de la relation de travail (salarié ayant pris acte de la rupture le 9 juin 2012). Cass. soc., 29 janv. 2019, n° 17-13.961 F-D
 
Rupture conventionnelle : le harcèlement caractérise un vice du consentement
 
Ayant relevé qu’à la date de la signature de la convention de rupture conventionnelle, la salariée était dans une situation de violence morale en raison du harcèlement moral et des troubles psychologiques qui en sont découlés, la cour d’appel a caractérisé un vice du consentement justifiant l'annulation de la rupture conventionnelle. Cass. soc., 29 janv. 2019, n° 18-24.296 F-D
 
Licenciement pour insuffisance professionnelle : il faut que des objectifs aient été clairement fixés !
 
Pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient qu'il est avéré que les objectifs en termes de temps passé ne sont pas atteints par la salariée, malgré les dispositifs d'organisation, les outils mis en place et la baisse avérée des affaires entrantes sur le trimestre. En se déterminant ainsi sans préciser quels objectifs avaient été fixés à la salariée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. Cass. soc., 29 janv. 2019, n° 18-11.346 F-D
 
Liquidation judiciaire : l'apprenti a droit à une indemnité égale aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme de son contrat
 
Lorsque le liquidateur lui notifie la nécessité de mettre fin à son contrat d'apprentissage dans les quinze jours du jugement de liquidation judiciaire, l'apprenti a droit à une indemnité égale aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme de son contrat. Cass. soc., 29 janv. 2019, n° 18-13.348 F-D
 
CDD d’usage : mieux vaut établir un contrat écrit
 
Le recours au contrat de travail à durée déterminée d'usage ne dispense pas l'employeur d'établir un contrat écrit comportant la définition précise de son motif. Cass. soc., 29 janv. 2019, n° 18-16.695 F-D
 
Accord atypique antérieur : quand cesse-t-il de produire ses effets ?
 
Faute de procurer un avantage aux salariés, la décision par laquelle, en l'absence de délégué syndical, l'employeur instaure le repos compensateur de remplacement prévu à l'article L. 3121-24, devenu L. 3121-37, du Code du travail ne constitue pas un acte soumis aux règles de dénonciation des engagements unilatéraux et devient caduque après que, les conditions de son existence ayant disparu par suite de l'assujettissement de l'entreprise à l'obligation annuelle de négocier, il ne lui a pas été substitué un accord collectif dans le délai imparti pour cette négociation.
La cour d’appel a constaté qu’il résultait du procès-verbal de réunion du 25 janvier 2005 que le délégué du personnel titulaire de l'entreprise avait été consulté par l’employeur sur la mise en place d'un dispositif de repos compensateur de remplacement et avait donné son accord sur cette décision unilatérale de l’employeur à effet au 1er janvier 2005, que cependant, à la suite de la désignation de M. M. comme délégué syndical à compter du 28 novembre 2013, si l’employeur avait engagé la négociation annuelle obligatoire en 2014, il n’était pas établi que celle-ci ait abouti et prévu la possibilité d'une substitution en tout ou en partie du paiement des heures supplémentaires par des repos compensateurs.
La cour d’appel en a déduit à bon droit que l'accord atypique antérieur avait cessé de produire ses effets au 1er janvier 2015, de sorte que le salarié avait droit au paiement des heures supplémentaires accomplies par lui à compter de cette date. Cass. soc., 29 janv. 2019, n° 18-16.001 F-D
 
Requalification : illustration 1 
 
Plusieurs arrêts ont été rendus en la matière le 29 janvier. Nous en retiendrons deux.
La cour d’appel a constaté que sur la période du 13 septembre 2010 au 29 juin 2015, soit pendant près de cinq ans et de manière quasiment continue, la salariée avait occupé les fonctions d’aide-soignante ou celle d’aide médico-psychologique au sein du même établissement, dans le cadre de 239 contrats à durée déterminée, parmi lesquels, en 2013, deux contrats au motif d’un accroissement temporaire d’activité dont l’employeur ne justifiait pas, que la plupart de ces contrats avaient été conclus pour assurer le remplacement de salariés absents, désignés par leur nom et leur fonction, que selon l’employeur lui-même, il devait faire face à un besoin structurel de main d’œuvre pour pourvoir au remplacement de salariés, enfin que durant la même période l’employeur avait eu recours dans des conditions identiques à quatre autres salariées qui avaient vu leur relation contractuelle s’achever à la même date.
La cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir que le recours aux contrats à durée déterminée était un mode habituel de gestion du personnel au sein de la structure, a pu en déduire que le recours à ces contrats avait eu pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'association. Cass. soc., 29 janv. 2019, n° 18-23.472 F-D
 
Requalification : illustration 2
 
La cour d'appel a constaté que sur la période du 10 février 2012 au 13 septembre 2015, soit pendant plus de trois ans et de manière quasiment continue, la salariée avait occupé les fonctions d'aide-soignante au sein du même établissement, dans le cadre de trois cent quatorze contrats à durée déterminée, parmi lesquels, en 2013, un contrat au motif d'un accroissement temporaire d'activité dont l'employeur ne justifiait pas, que la plupart de ces contrats avaient été conclus pour assurer le remplacement de salariés absents, désignés par leur nom et leur fonction, que selon l'employeur lui-même, il devait faire face à un besoin structurel de main d'œuvre pour pourvoir au remplacement de salariés, enfin que durant la même période l'employeur avait eu recours dans des conditions identiques à quatre autres salariées qui avaient vu leur relation contractuelle s'achever à la même date.
La cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir que le recours aux contrats à durée déterminée était un mode habituel de gestion du personnel au sein de la structure, a pu en déduire que le recours à ces contrats avait eu pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'association. Cass. soc., 29 janv. 2019, n° 18-23.473 F-D
 
Application du statut de VRP : lumière sur le critère d’indépendance
 
Ayant relevé que le salarié ne disposait d’aucune indépendance dans l’organisation et l’exercice de son travail, que son rôle était limité à la prise d’ordres, dans le cadre de tournées organisées par l’employeur, avec remise de la marchandise aux clients, contre encaissement du prix et restitution de la recette chaque jour à l’entreprise, que la tâche de livraison n’était pas accessoire, la remise de marchandises étant concomitante à la commande, la cour d’appel a pu en déduire que le salarié, qui exerçait à titre principal des fonctions de vendeur-chauffeur-livreur, ne relevait pas du statut de VRP. Cass. soc., 29 janv. 2019, n° 18-17.651 F-D
 
Source : Actualités du droit